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L'éboueuse Nancy

Le réseau des tramways toulonnais possédait une drôle de machine ressemblant à une petite motrice de tramway avec son poste de conduite à plate-forme ouverte, sa perche de prise de courant mais sans vitres ni marche-pieds. Elle était dotée d'un truck à empattement très court puisqu'il ne mesurait que 1,964 m ce qui permettait à la machine d'aborder les courbes les plus serrées. Cette machine unique sur le réseau ne prit jamais le moindre voyageur.

Il s'agit en fait d'une éboueuse construite en 1925 à Nancy par les ateliers de de la Confédération Générale Française des Tramways (CGFT) dont voici le type ci-dessous, une rare photo dénichée par l'ami Henri Martin.

Alors pourquoi une éboueuse ? L'explication est simple, les  rails du tramway sont encastrés dans la chaussée selon le système inventé par l'ingénieur Nantais Alphonse Loubat en 1852. Ainsi ils constituent une sorte de gouttière qui finit par s'obstruer à cause de la boue apportée par les pluies ou le nettoyage des rues.

Dans l'excellent livre de Jacques Laupiès et Roland Martin : "Les tramways de Marseille ont cent ans ", les auteurs nous expliquent qu'à Marseille, Il existait dans les premières années, au tout début des tramways, un racleur à cheval mais dans la pratique, le travail était fait manuellement par un humble ouvrier de la voie qui effectuait le curage des rails et le graissage des aiguillages. Le "racleur" lampiste de la hiérarchie des traminots, arpentait à longueur d'année les lignes du réseau traînant avec lui tiges, crochets et raclettes de toutes sortes. Un travail pénible, languissant et peu prestigieux mais indispensable au bon fonctionnement du service. On peut imaginer sans peine qu'à Toulon, ce fut le même cas de figure.

Le réseau marseillais se décida à moderniser le système de nettoyage et fit venir des ateliers de la CGFT à Nancy, deux motrices spécialement équipées pour ce travail : elles comportaient, montés dans une caisse occupant l'emplacement du compartiment à voyageurs, deux réservoirs à eau encadrant un réservoir à boues; des ajutages (des sortes de buses) projetant l'eau dans les gorges des rails sous forme d'un jet puissant. Des racloirs soulevaient alors les boues ainsi obtenues que des manches d'aspiration avalaient pour les rejeter dans le réservoir adéquat. Lorsque le réservoir était plein, une sonnerie avertissait le personnel de conduite qui dirigeait alors l'éboueuse vers les avaloirs de vidange spécialement construits à cet effet.

Une troisième éboueuse identique fut achetée en même temps par le réseau de Toulon. Elle fut mise en service en 1926 comme ses 2 "soeurs " marseillaises. Elle fonctionna jusqu'en 1946 date à laquelle elle fut déclassée avec un moteur hors d'usage puis démolie.

A Marseille, les 2 premières éboueuses mises en service ne donnèrent pas de bons résultats et il fallut se dépêcher d'en construire 2 autres en 1929. A Toulon, on peut penser que les problèmes rencontrés furent identiques mais la seule éboueuse possédée par la STVG demeura en service pendant 20 ans.

Ces éboueuses avaient été construites à Nancy selon un modèle déjà en usage sur ce réseau géré également par la CGFT. On leur reprocha différentes malfaçons : empattement non conforme entraînant des impossibilités de manœuvre du matériel, ruptures d'essieux, défaut d'accouplement du ventilateur, engorgement des conduits, défauts d'étanchéité rendant difficile l'obtention du vide et surtout un défaut d'étanchéité des ventilateurs qui avaient tendance à projeter jusqu'à 8 ou 10 mètres en l'air les matières ramassées, boues, feuilles mortes, crottin de cheval, pour le plus grand déplaisir des riverains et des passants !! On ignore si de telles mésaventures arrivèrent à Toulon mais les machines étant identiques, les désagréments le furent sans nul doute.

Le passage de cet engin bruyant et fort lourd (22, 5 tonnes à pleine charge) n'était pas sans se faire remarquer des passants.

On a évoqué plus haut la nécessité de vidanger le réservoir de l'éboueuse par un système d'avaloir prévu à cet effet. Cet avaloir était masqué en permanence par une dalle, une sorte de trappe que l'éboueuse soulevait au moment de la vidange grâce à un dispositif comportant une vis sans fin commandée depuis la plate-forme du conducteur.

Sur le réseau toulonnais, la trappe de vidange se trouvait entre les rails, dans le milieu du tablier de la passerelle métallique du pont des Gaux ( qui franchissait la Rivière Neuve à l'Escaillon ). Cette passerelle de 16 m de long par 4 m de large fut construite en 1904, elle était dédiée exclusivement au passage du tramway. La motrice s'arrêtait sur ce pont, on ouvrait la trappe et on balançait toutes les boues dans la rivière qui coulait au-dessous. A  l'époque, il est vrai que l'on ne s'embarrassait guère de considérations écologiques.

Ce véhicule unique fut déclassé en 1946 et démoli.

 Sources et iconographie, sites web à consulter :

L'immense majorité des renseignements sur les tramways  provient de l'ouvrage suivant : "1880-1980  Un siècle de transports en commun dans l'agglomération toulonnaise" par Gabriel Bonnafoux (†) et Albert Clavel, paru en 1985 à compte d'auteur; imprimé par les Presses  de l'Atelier du Beausset - 83330 Le Beausset.( épuisé et difficile  à trouver) - Les données historiques sur les Ets Carde proviennent de Charge utile magazine N° 134, 135 et 136 sortis en 2004 et du site http://ruedupetittrain.free.fr/personnages/carde-gustave.htm  

Photos  RMTT et STVG : Tout d'abord un immense merci à Yohan Keller (ASBTP : Association pour la Sauvegarde des Bus Toulonnais et Provençaux, site : https://asbtp83asso.jimdo.com/ pour les magnifiques photos qu'il m'a transmises. Certaines sont de Philippe Benoît  ou de Mr Giraud.

Collection Henri Martin

Hélas parmi tous les passionnés qui ont permis de collecter les données historiques ou les photos qui illustrent ces pages, beaucoup nous ont quittés, les petites croix (†) figurant auprès de trés nombreux noms cités ci-dessous en témoignent hélas. Je dédie ces pages à leur mémoire en témoignage de ma reconnaissance.

Frédéric Durante (†)   ARTM (Amis du Rail et des Transports de Marseille) et son site personnel : http://durante.chez-alice.fr/

Claude Borderie († 02 février 2016 ) FACS Fédération des amis des chemins de fer secondaires. Je dédie cette page à la mémoire de cet homme passionné des tramways et des chemins de fer à voie étroite, il avait eu la gentillesse de m'envoyer en novembre 2007, tout un lot de photos de tramways de Toulon.

Jacques Laupiès (†)  et Roland Martin (†), "Les tramways de Marseille ont cent ans", 1976 - La documentation, certaines photos et le diagramme sont extraits de ce livre.

Jean Robert (†) " Histoire des Transports dans les Villes  de France" édité à compte d'auteur en 1974 - épuisé ( Jean Robert fut l'un des fondateurs de l'AMTUIR) - La photo de la motrice série D d'origine RATVM est tirée du livre de Jean Robert.

Wikipedia pour l'article sur les anciens tramways de Marseille - Documentation de la CGFT ( Compagnie générale française de Tramways.

Autres photos: collection  personnelle de cartes postales de Roland Le Corff dont certaines issues de la collection de Renaud Sémadéni (Toulon)  ou de Marius Bar - Merci également à Jean-Louis Bobinec  pour ses photos et à Bernard Carruesco : voir son excellent site sur les jetons de transport par tramways : Jacques Bérengier pour ses superbes maquettes de tramways, voir son site Transports miniatures.

Musée de l'AMTUIR : http://www.amtuir.org/   Merci  à Thierry Assa, secrétaire de l'AMTUIR qui m'a autorisé à utiliser  des photos provenant de la collection du musée.

©   Roland Le Corff  -  créée le 11/06/2003 - version du 04/03/2021